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deux nations européennes comme une aimable fille entre deux prétendants. Rien n’était plus flatteur pour son amour-propre ; à l’usage, rien ne pouvait devenir plus dangereux pour nous. À force de jouer en quelque sorte le rôle d’arbitre, il pouvait arriver qu’un jour le nabab voulût imposer ses préférences. Or ses inclinations le portaient du côté des Anglais et s’il eut été complètement libre, peut-être, après l’arrivée de Griffin, se fût-il à nouveau rallié à leur cause ; mais il devait aussi compter avec son suzerain, le vieux Nizam, qui, sans être notre allié, n’hésitait pas à nous donner à chaque occasion des témoignages d’amitié. Son ministre, Iman-Sahib, ancien serviteur de Dost-Ali Khan, se rappelait toujours les excellentes relations qu’il avait eues avec le gouverneur Dumas et les avantages financiers qu’il en avait retirés. Et comme, malgré le temps qui souvent use le crédit, il continuait de jouir d’une grande influence à la cour, son autorité se faisait sentir jusque dans Arcate, où la dynastie était trop récente et trop mal assise pour risquer une politique trop exclusivement personnelle.

Nizam se sentant au déclin de ses jours avait légué une partie de ses pouvoirs et cédé l’administration directe de quelques-unes de ses provinces, notamment le Carnatic, à l’un de ses fils Naser j. et lui avait en même temps donné Iman-Sahib pour remplit auprès de lui les fonctions de conseiller et de ministre. Iman-Sahib se trouva ainsi par les circonstances le maître réel de la situation à la côte Coromandel, et c’est pourquoi, malgré ses sentiments intimes, Anaverdi Kh. n’osa pas se décider à s’allier franchement avec les Anglais. Chaque concession était presque aussitôt suivie d’une réticence : ainsi, en décembre 1747, il promit au gouverneur Floyer[1] de lui

  1. Floyer avait remplacé Hinde, décédé le 26 avril précédent.