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recours au dépôt des bijoux de ma femme ; mon argenterie allait être portée à la Monnaie, lorsque le 22 juin 1748 mouilla à Madras une escadre française commandée par M. Bouvet qui jeta à terre de l’argent et 300 hommes tant sains que malades. Cette escadre disparut dans la nuit et retourna à l’Île de France.

« Le débarquement fait à Madras m’occasionna de nouveaux embarras et de nouveaux risques. Je les surmontai tous et l’argent fut rendu à Pondichéry le 28 juillet. Ces fonds me devinrent alors plus à charge que je n’en tirai d’utilité. L’escadre anglaise commandée par M. Boscawen parut au nombre de 26 vaisseaux le 4 août. Dès ce moment toutes les ressources que je pouvais avoir du pays pour les provisions de toute espèce, me furent interdites et il n’était plus temps de faire amas de la moindre provision. Pondichéry était donc perdu si j’avais attendu des secours d’Européen argent et si par ma prévoyance et par mes déboursés je n’avais pas mis cette place en état de soutenir un long siège. Une douzaine de jours n’était pas suffisante pour y parvenir et j’y travaillais depuis quatre ans. Je recevais alors par différentes voies les lettres les plus affectueuses de la Compagnie ; elle ne comptait que sur moi et sur mes ressources, j’étais sa seule espérance et je devais m’attendre à tout de sa reconnaissance.

« Le siège eut lieu ; cinquante-huit jours d’attaque dont quarante de tranchée ouverte ne purent obliger la place de se rendre ; l’ennemi leva le siège et se retira avec ses pertes dans ses colonies le 17 octobre. Je ne fis point usage de la liberté que la Compagnie me laissait d’offrir des sommes bien considérables au nabab pour l’empêcher de joindre ses forces à celles de l’Anglais ; j’en connaissais toute la valeur et quoique ses pavillons se joignissent à ceux des Anglais, je sauvai la ville et épargnai à la Compagnie une somme de plus d’un million, en ne donnant rien au nabab, qui disparut peu de jours avant l’Anglais.

« Je ne perdis point de temps à réparer mes brèches et tous