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Page:Maurault - Histoire des Abénakis depuis 1605 jusqu'à nos jours, 1866.djvu/274

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histoire

Abénakis, une grande chemise en reliquaire[1].

Le Père ne repartit de France qu’au mois de Février 1694, et arriva à Québec au printemps, avec le précieux présent.

Afin de mieux faire connaître comment les Abénakis apprécièrent ce don, qui leur venait de si loin, nous allons donner ici la lettre que le Père écrivit aux chanoines de Chartres, à l’automne de la même année.

« Messieurs,

« Je souhaiterois que vous eussiez vous mesmes esté témoins des sentiments de respect, de dévotion et de tendresse avec lesquels vostre précieux don a esté reçu par nos Abnakis. J’ay esté assez heureux pour en estre moy-mesme le porteur, retournant de France à ma chère mission ; le peu de sureté qu’il y avoit à l’envoyer me l’avoit fait retenir en France jusqu’à mon départ. Mais je crus le pouvoir risquer en m’embarquant moy-mesme et je ne doutay point

  1. On conservait alors dans les trésors de la cathédrale de Chartres un grand nombre de chemises d’or ou d’argent, portant d’un côté l’image de la Sainte-Vierge, et de l’autre un crucifix. Ces chemises étaient enrichies d’un grand nombre de reliques. On en envoyait en différents endroits aux serviteurs de Marie, comme marques d’estime et d’affection.

    On voit encore aujourd’hui dans les trésors de cette église la chemise que la Sainte-Vierge portait lorsque l’Ange lui annonça qu’elle serait la Mère de Dieu. Cette précieuse relique fut donnée à l’église de Chartres, en 877, par le roi Charles-le-Chauve, qui l’avait par succession de Charlemagne, son aïeul, à qui Constantin Porphyrogénète, Empereur d’Orient, l’avait envoyée par reconnaissance des services qu’il lui avait rendus, particulièrement contre les Maures, qui lui voulaient aussi ôter l’Empire.

    C’est de là que tenait l’usage d’envoyer comme présent ces sortes de chemises en reliquaire, ayant la même forme que celle de la Sainte-Vierge.

    On conserve encore dans l’église de Chartres un voile de la Sainte Vierge, qui fut donné en même temps que la chemise.