Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/46

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cevant des soins de propreté des mains de la noblesse, et moi je peindrai ce tableau tant bien que mal pour la plus grande gloire de Soulès, à la santé de qui je porte un toast vainqueur !

Le gros de la table rit de cette bouffonnerie ; mais Soulès et Oudaille soutinrent leur dignité.

― De la noblesse, il n’en faut pas, dit Coq persistant dans le même sujet avec l’obstination particulière aux illettrés qui ne savent pas couper court sur une discussion qui peut gêner les auditeurs, il y a assez longtemps qu’on nous embête avec les nobles, les calotins et toute la séquelle, et le moment n’est peut-être pas éloigné où l’on jettera tout cela dans la hotte.

― Bravo ! bravo ! crièrent Oudaille et Soulès.

― Attrape, curé ; attrape, marquis, dit Léon Gaupin.

― Lui ! dit le marquis en désignant l’abbé Ecoiffier qui faisait des gestes pour qu’on criât moins fort, il sera nommé grand-pontife de la déesse Raison et moi surintendant des menus plaisirs du prochain comité de Salut public.

― Messieurs, on ne parle pas politique, vous savez, dit le père Lamoureux qui entendait tout ce vacarme de sa cuisine.

― Tu es comme les sergents de ville, tu arrives quand il n’y a plus d’arrestations à faire, lui dit Marius Simon qui était son ami intime et lui devait plus de deux mille francs.

― N’amène donc pas Coq ici, dit Oudaille à l’oreille de Soulès, à qui il essayait vainement de l’enlever depuis un mois, c’est un imbécile.

Pendant ce temps, Ecoiffier et son compère Lecardonnel, ancien avoué à Amiens, paraissaient observer avec