Page:Mercure de France - 1816 - Tome 68.djvu/62

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ses volontés sont despotiques. M. Weston sacrifiant l’amour paternel à l’avantage de son fils, l’a confié à son oncle Churchill, et c’est seulement quand il va à Enscombe qu’il peut voir Franck.

La société de M. Woodhouse éprouve un grand vide par la perte de Mlle Taylor ; elle est composée de M. Knigthley, dont le frère a épousé la sœur aînée d’Emma, de M. Elton, vicaire d’Hygbury, de Mme Bates, et de sa fille puînée ; et d’une Mme Godard, maîtresse de pension. Toutes ces dames sont très-promptes à accepter les invitations qui leur viennent d’Hartfield ; on va les chercher en carrosse, et elles s’en retournent de même toutes les fois que Jacques, ses chevaux, et M. Woodhouse ne trouvent pas que ce soit une corvée trop forte.

Mme Bates, veuve de l’ancien vicaire d’Hygbury, âgée, un peu sourde, jouit d’autant de considération que l’on peut en avoir quand on n’est point riche. Sa fille est si bonne qu’elle est aimée généralement, quoiqu’elle ne soit plus jeune, que jamais elle n’ait été jolie, et qu’elle ne cesse jamais de parler. Mais comme elle n’ouvre la bouche que pour dire des choses affectueuses, marquer sa reconnaissance des attentions que l’on a pour sa mère et pour elle, ou pour dire du bien de quelqu’un, on lui pardonne son bavardage. Un jour que la société, doit par les soins d’Emma, s’assembler pour prendre du thé et faire la partie de M. Woodhouse, Mme Godard écrit pour demander la permission d’amener avec elle miss Henriette Smith, l’une de ses pensionnaires, jolie blonde aux yeux bleus, blanche, potelée, âgée de dix-sept ans, mise en bas âge chez Mme Godard, où elle est très-bien élevée ; car cette maison d’éducation ne ressemble point aux autres, on y étudie, on y joue, on y a une nourriture saine et sur-tout abondante. Les grâces d’Henriette, la douceur de son caractère, voilà tout ce que l’on sait d’elle, ses parens sont inconnus. Elle a été passer un temps assez long dans une famille de fermiers nommés Martin ; ils louent la ferme de Donwell qui appartient à M. Knigthley. Emma, dont l’imagination est vive, et qui est souveraine dans la maison paternelle, prend la réso-