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Prosper Marchand a publié pour faire suite au Dictionnaire de Bayle et à celui de Chauffepié.


AUBIGNÉ (Nathan d’), appelé en latin Albineus, dit La Fosse, fils du précédent, exerça la médecine à Genève, où il obtint la bourgeoisie en 1627. Il a publié : Bibliotheca chemica, contracta ex delectis et emendatione Nathanis Albinei, Genève, 1654, in-8°, et 1675, in-8° ; recueil de divers traités, ainsi que le titre l’indique : on y trouve entre autres le Novum Lumen chemicum de Michel Sendivogius, Polonais ; et l’Arcanum philosophiæ hermeticæ de d’Espargnet. — Tite d’Aubigné, fils, et non pas frère de Nathan, né à Genève en 1651, docteur en médecine en 1660, puis ingénieur ordinaire au service de la Hollande, a publié : la Défense droite, qui est la fortification défensive establie sur les principes fixes et nouveaux de M. de Cœhorn, Breda, 1705, in-8°.


AUBIN. Voyez Saint-Aubin.


AUBIN, né à Loudun, dans le 17e siècle, fut ministre de la religion réformée, et se vit obligé de quitter sa patrie après la révocation de l’édit de Nantes. Il se réfugia en Hollande, et publia l’Histoire des diables de Loudun, ou de la possession des religieuses ursulines, et de la condamnation et du supplice d’Urbain Grandier, curé de la même ville, Amsterdam, 1695, in-12. La tragi-comédie de Loudun avait fait naître un grand nombre d’écrits pour ou contre la démonomanie des religieuses ; celui d’Aubin acheva de déchirer le voile qui couvrait cette affaire, et mit à nu les ressorts qu’on avait fait jouer pour en amener la sanglante péripétie. Peut-être la participation du cardinal de Richelieu aux jongleries qui la précédèrent ne fut-elle pas aussi directe que l’auteur semble le croire. Ne faudrait-il pas en laisser le principal mérite à ce commissaire (voy. Laubardemont) inique et vénal, qui croyait acheter des droits à de nouvelles faveurs par l’exagération de son zèle ? Le livre d’Aubin intéresse à la fois par le fond du sujet et par le mérite de la narration. Il fut souvent imprimé et traduit en hollandais. On en a publié des éditions sous les titres de : Cruels effets de la vengeance du cardinal de Richelieu, Amsterdam, Roger, 1716, in-12 ; et de : Histoire d’Urbain Grandier, Amsterdam, 1755, in-12. Le même sujet a été traité de nouveau, en 1825, par Hipp. Bonnelier. La Ménardaye, prêtre de l’oratoire, fit paraître, en 1719, une critique de l’ouvrage d’Aubin[1]. Malgré les progrès de la raison publique, le bon oratorien prend ouvertement parti pour le sortilège, et il traite avec beaucoup de mépris la personne et l’ouvrage du pasteur calviniste. Chacun d’eux travailla, sans doute, sous l’influence de ses préventions politiques et religieuses ; mais celles d’Aubin éloignèrent peu des bornes du vraisemblable, tandis qu’elles égarèrent l’autre historien jusqu’aux hallucinations des siècles l’ignorance. Les libraires d’Amsterdam, affriandés par la vogue de l’Histoire des diables, pressèrent Aubin de leur livrer d’autres productions. Il publia, en 1698, une traduction de la Vie de Michel de Ruyter, par Brandt, in-fol., fig., qu’il dédia à Lefort, amiral des armées navales de Russie. Après avoir cherché à établir les rapports qui pouvaient exister entre cet amiral et Ruyter, Aubin ajoute : « Ce sont ces rapports, et la circonstance de votre séjour en ces provinces, qui m’ont inspiré la pensée d’offrir cet ouvrage à votre Excellence, comme étant convenable aux grands desseins de Sa Majesté czarienne, pour avancement de la marine dans son vaste empire. » Voulant traduire la Vie de Michel Ruyter, Aubin dut se livrer à l’étude particulière du langage de la marine, et il amassa ainsi les matériaux d’un Dictionnaire de Marine qui parut en 1702, Amsterdam, in-4°. Il avait tiré de grands secours de l’ouvrage estimé que M. Witsen, bourgmestre d’Amsterdam, avait publié en hollandais sur le même sujet.

Celui d’Aubin obtint les honneurs d’une seconde édition, Amsterdam, 1756, in-4°. Chaque terme de marine y est accompagné d’un mot hollandais. Des figures représentent les objets dont une simple description ne pourrait donner une idée suffisante. Les principes de l’architecture navale complètent les notions que ce dictionnaire renferme sur toutes les branches de la navigation. Dreux du Radier, qui a consacré un article à Aubin, dans sa Bibliothèque historique et critique du Poitou (t. 4, p. 299), ne donne aucun renseignement sur sa personne, et il s’occupe uniquement de l’Histoire des diables de Loudun.


AUBLET (Jean-Baptiste-Christophe Fusée), botaniste français, né à Salon, en Provence, le 4 novembre 1720, s’échappa de la maison paternelle, et alla à Montpellier, pour s’y livrer à l’étude de la botanique ; il passa ensuite dans les colonies espagnoles d’Amérique, où il exerça la profession de pharmacien. De retour dans sa patrie, il fut envoyé à l’île de France, en 1752, pour y établir une pharmacie et un jardin de botanique. Il y séjourna neuf ans. Il eut des altercations avec le célèbre Poivre, et on lui reproche d’avoir contrarié les projets de cet administrateur pour la naturalisation des arbres à épiceries dans cette colonie, jusque-là qu’on l’accusa d’avoir fait passer à l’eau bouillante les graines qu’on lui avait confiées, afin de détruire leur faculté germinative ; ce qui est hors de toute vraisemblance. Il exarnina les plantes de l’île, mais superficiellement, et revint en Europe. Il fut envoyé, en 1762, à la Guyane, où il rassembla un herbier considérable. Ce pays, qui n’avait pas été parcouru par les botanistes, offrait une moisson aussi riche que nouvelle ; car Préfontaine, Barrère et mademoiselle Mérian l’avaient à peine effleuré. Aublet dit, dans sa relation, qu’il pénétra fort avant dans les contrées désertes ; d’autres assurent qu’étant retenu par une maladie, fruit de ses débauches, il dut sa collection al des nègres qu’il envoyait parcourir les forêts. De là il passa, en 1761, à l’île de St-Domingue, sur rétablissement que le comte d’Estaing avait formé au môle St-Nicolas, et il revint à Paris l’année suivante. Bernard de Jussieu le détermina à arranger les matériaux qu’il avait apportés de ses voyages, et il en résulta un ou-

  1. Examen et discussion de l’Histoire des Diables de Loudun, Liège (Paris). 1749. 2 vol. in-12.