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AZANZA (don Manual-José de) naquit en 1746, à Aoiz, dans la Navarre espagnole. Après avoir fait ses études à Sanguesa et il Pampelune, il se rendit, à l’âge de 17 ans, auprès de son oncle, don Martin Joseph de Alegria, qui remplissait au Mexique les fonctions de directeur général de la compagnie royale, et qui devint ensuite administrateur du trésor royal de la Vera-Cruz. Employé d’abord sous cet oncle[1], il fut choisi pour secrétaire par don Joseph de Galver, marquis de Señora, inspecteur général de la Nouvelle-Espagne, et depuis ministre des Indes, qui lui confia des missions importantes, et le chargea de parcourir plusieurs des provinces de l’Amérique septentrionale soumises à la domination espagnole. Toutefois il quitta cette carrière en 1771, pour entrer, comme cadet, dans le régiment de Lombardie, et passa, le 4 mai 1774, en qualité de lieutenant, dans le régiment de la Havane, où il fut nommé capitaine en 1776. Azanza était en même temps attaché, comme secrétaire, au marquis de la Torre, capitaine général de l’île de Cuba et gouverneur de la Havane. Lorsqu’au mois d’août 1777, ce général revint en Espagne, il y ramena son secrétaire, qui fut transféré avec son grade de capitaine dans le régiment de Cordoue, infanterie. Il se trouvait, en cette qualité, au siège de Gibraltar, en 1781. La même année, le marquis de la Torre ayant été nommé ambassadeur d’Espagne près la cour de Russie, Azanza l’accompagna à Petersbourg. Les services qu’il eut occasion de rendre dans quelques négociations délicates le tirent nommer secrétaire de cette ambassade ; peu après il resta seul chargé des affaires. En décembre 1784 il reçut ordre de se rendre tl Berlin avec le titre de chargé d’affaires. Il séjourna deux ans dans cette capitale, et retourna dans sa patrie en 1786, pour y remplir les fonctions d’intendant de la province. En 1788, il fut promu à l’intendance de Salamanque, et nommé corrégidor de cette ville ; réunissant ainsi, par une faveur qui, aux termes mêmes de l’ordonnance de nomination, n’avait encore été accordée qu’à lui seul, deux emplois importants. Le 24 mai 1789, il passa à l’intendance de l’armée et du royaume de Valence ; en 1793, quand éclata la guerre avec la France, la confiance du roi l’appela à l’intendance de l’armée du Roussillon, fin décembre de la même année, il fut nommé ministre de la guerre. Il conserva ce poste difficile pendant près de trois ans, et le quitta le 19 octobre 1796, pour occuper celui de vice-roi, gouverneur, capitaine général de la Nouvelle-Espagne, et président de l’audience royale de Mexico. Ce nouvel emploi n’était guère moins considérable ni moins important que le premier, et Azanza, qui avait passé une partie de sa jeunesse dans le Mexique, qui réunissait aux connaissances militaires des talents administratifs éprouvés, semblait avoir des titres incontestables à le remplir ; néanmoins son départ pour l’Amérique ne fut considéré que comme un brillant exil, et le titre pompeux dont il était décoré passa pour n’être que le masque d’une disgrâce. La cause véritable de son éloignement de la cour paraît en effet avoir été la surprise et le mécontentement qu’il ne craignit pas de témoigner de l’élévation scandaleuse de Godol, le mépris et l’aversion qu’il laissa percer en diverses occasions pour ce vil favori. En 1799, Azanza, rappelé du Mexique, n’obtint, en dédommagement de la place qu’9n lui retirait sans cause, que le titre de conseiller d’État ; et, après une courte apparition a la cour, il se rendit dans sa terre de Santa-Fé, près de Grenade, où il vécut dans la retraite jusqu’à l’abdication de Charles IV et la chute de son ministre. Lorsque après les événements d’Aranjues Ferdinand devint roi d’Espagne, il s’empressa de rappeler autour de lui tous ceux que la disgrâce ou l’humeur soupçonneuse du prince de la Paix avait tenus éloignés de la cour : Azanza, mandé aussitôt, arriva le 28 mars 1808 à Madrid, et le portefeuille des finances lui fut immédiatement confié. Peu de jours après, Ferdinand, quittant sa capitale pour se rendre à Burgos, ou plutôt à Bayonne auprès de Napoléon, confia le gouvernement de ses États à une junte suprême présidée par son oncle, l’infant don Antonio, et composée de son ministère, dont les membres étaient don Pédro Cevallos, don Francisco Gil de Lemos, don M.-.l. de Azanza, don G. O’ Farrill et don Séb. Piñuela. Azanza remplit dignement les devoirs que, dans ces temps difficiles, son poste périlleux lui imposait : il soutint avec fermeté, contre Murat qui commandait le corps d’armée français dans Madrid, les droits de son souverain, que ce général refusait de reconnaître, et ceux de la junte, aux délibérations de laquelle il voulait assister ; mais le 4 mai suivant l’infant don Antonio lui-même s’enfuit de Madrid, et son départ fut comme le signal d’une désertion complète de la cause de sa famille. (Voy. Antonio.) Murat ayant persisté dans sa prétention de siéger au sein de la junte, Azanza donna sa démission de membre de cette assemblée et de ministre des finances. Deux jours après arrivèrent à Madrid les renonciations que la violence et la perfidie avait arrachées au roi à Bayonne. La junte suprême fut dissoute et ses pouvoirs révoqués le même jour. Le 6 juin suivant, un décret impérial proclamait Joseph Bonaparte roi d’Espagne et des Indes ; mais Azanza n’avait pas même attendu jusque-là pour se soumettre au pouvoir nouveau qui s’établissait dans sa patrie. Sa démission de ministre des finances ne fut point acceptée ; un ordre de Napoléon lui prescrivant d’aller à Bayonne pour y rendre compte de l’état des finances de l’Espagne, il se hâta d’obéir : il rédigea, chemin faisant, de concert avec les principaux employés de son ministère qui l’accompagnaient, un mémoire qu’il présenta le 28 mai à l’empereur. Celui-ci récompensa son inconcevable docilité en le nommant présidial

  1. Cet oncle, auprès duquel Azanza acheva son éducation, était alors, à la Havane, directeur général de la compagnie des Caracas. Il l’accompagna depuis à la Vera-Cruz et au Mexique, et le seconda dans ses nouvelles fonctions et dans les mesures qu’il eut a exécuter pour l’expulsion des jésuites. Ce fut en 1768 qu’Azanza, devenu un des secrétaires de Galvez, fut chargé de constater la réalité et l’importance des mines de Señora, et d’empêcher les établissements que d’autres puissances de l’Europe, et surtout l’Angleterre, pourraient former dans la Nouvelle-Californie et sur la côte nord-ouest de l’Amérique.
    A-t.