Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 2.djvu/542

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d’Azara les renseignements nécessaires pour appuyer son imposture. N’ayant pu y réussir, il employa tous les moyens pour empêcher les Indiens indépendants d’apporter des animaux à Azara. Cependant ce dernier avait communiqué plusieurs de ses mémoires à quelques-uns de ses subalternes qui en tirèrent des copies ; il en parut une partie dans un ouvrage périodique imprimé à Buenos-Ayres, et l’on eut bien soin d’omettre le nom de l’auteur. Le vice-roi, réunissant tous ces lambeaux, tant imprimés que manuscrits, en composa une relation qu’il envoya à sa cour comme étant le fruit de ses recherches. Toutes ces tracasseries ne diminuaient en rien le zèle d’Azara. Chargé de reconnaître le littoral au sud de Buenos-Ayres, il s’acquitta de cette commission, d’autant plus pénible que ce pays absolument désert se trouvait exposé aux attaques journalières des Pampas, peuplade féroce. On lui donna ensuite le commandement de la frontière du Brésil ; il dut la reconnaître et en chasser les Portugais qui y étaient établis ; enfin il reçut l’ordre de visiter les bords de la Plata, et de dresser un plan de défense en cas d’attaque de la part des Anglais. Il composa aussi des instructions et des mémoires qui lui étaient demandés par les vice-rois et les gouverneurs sur divers objets, présenta des projets pour la civilisation des Indiens, et fit établir des colonies à l’est de l’Uruguay. Depuis longtemps il sollicitait son retour en Espagne ; il y revint à la fin de 1801, s’occupa de publier ses travaux sur l’histoire naturelle, et accourut à Paris pour y revoir son frère. Il eut la douleur de le perdre en 1801. Appelé dans sa patrie, il fut créé membre d’un conseil composé de généraux et chargé de la défense des deux Indes. Ensuite il se retira dans l’Aragon et y mourut en 1811. On a de lui : 1° un ouvrage sur les quadrupèdes. Pendant ses voyages Azara avait envoyé à son frère, ambassadeur à Paris, des notes manuscrites dont Moreau de St-Méry publia une traduction française intitulée : Essai sur l’Histoire naturelle des quadrupèdes de la province du Paraguay, écrit depuis 1783 jusqu’en 1796, avec un Appendice sur quelques reptiles ; Paris, 1801, 2 vol. in8°. De retour en Europe, Azara compléta son premier travail, et l’ouvrage, ainsi amélioré, fut imprimé en espagnol sous ce titre : Apuniamientos para la Historia natural de los quadrupedos del Paraguay y Rio de la Plata, Madrid, 1802, 1 vol. petit in-4°. Ce livre est très-peu connu des naturalistes : Cuvier et Fischer n’en ont fait aucune mention. Azara, étant venu à Paris visiter le Muséum d’histoire naturelle, fit de nouvelles observations pour servir de rectifications à son ouvrage espagnol sur les quadrupèdes. Elles ont été insérées par M. Walckenaér dans l’édition du Voyage d’Azara dont nous parlerons bientôt. 2° Apuntamientos para la Historia natural de les pajaros del Paraguay y Rio de la Plata (Observations sur l’histoire naturelle des oiseaux, etc.), Madrid, 1802 à 1805, 5 vol. in-8°. Quand Azara commença ses travaux sur l’histoire naturelle, il manquait d’instruction préalable, de livres, de secours. N’ayant que les matériaux qui s’offraient à lui de toutes parts, il fit des descriptions minutieuses de chaque individu ; mais bientôt elles s’accumulèrent au point qu’il lui devint impossible de reconnaître s’il avait ou n’avait pas décrit certaines espèces, et que dans le doute il les décrivait plusieurs fois. Enfin, pour s’épargner cette besogne inutile, il distribua les individus en groupes, qu’il distingua par des caractères généraux observés dans les espèces, ce qui soulagea sa mémoire, et le rendit plus habile dans l’observation. Un heureux hasard l’ayant rendu possesseur de la traduction espagnole des œuvres de Buffon, il refondit son travail, fit les observations critiques que lui suggéra la lecture du naturaliste français, et envoya ces notes au traducteur Joseph Clavijo y Faxardo ; celui-ci n’en fit aucun usage et négligea même de lui répondre. Azara, en rapprochant ses descriptions de celles de Buffon, continuait à noter soigneusement toutes les erreurs qu’il croyait y découvrir. On a eu tort d’attribuer à la haine ou à la jalousie les expressions quelquefois très-vives de sa critique ; la rudesse de son style était due à son zèle pour la vérité, et a l’humeur chagrine que lui causait son séjour forcé dans de tristes solitudes. Lui-même fait cet aveu. Il a enrichi la science de nouvelles découvertes, mais souvent ses descriptions ne reposent que sur de petits détails et des particularités hasardées. Du reste, laborieux et bon observateur, il a recueilli une masse de faits très-intéressants, et a donné des détails précieux sur les mœurs des mammifères et des oiseaux du Paraguay. 5° Voyage dans l’Amérique méridionale, depuis 1781 jusqu’en 1801, Paris, 1809, -1 vol. in-8° et atlas. Ce livre fut publié sur le manuscrit de l’auteur, par M. C.-A. Walckenaër, qui le fit précéder d’une notice sur sa vie et ses écrits, à laquelle nous avons eu recours. On trouve dans cet ouvrage, qui a été traduit en allemand, la description géographique, politique et civile du Paraguay et du Rio de la Plata, l’histoire de la découverte et de la conquête de ces contrées, des détails nombreux et instructifs sur leur histoire naturelle et sur les Indiens qui les habitent. Cette relation, très importante pour la géographie et l’ethnographie de ces régions de l’Amérique méridionale, ne peut être consultée qu’avec fruit. Souvent on y désire plus de méthode, et quelquefois des développements plus étendus sur certains points. Azara, blâmant la méthode employée par les jésuites pour civiliser les Indiens, pense qu’elle n’était bonne qu’à les retenir dans une enfance continuelle, et que ces peuples ont fait plus de progrès lorsqu’on s’est occupé de les instruire, en leur laissant leur ancienne liberté, sans les astreindre à vivre en communauté. En communiquant ses manuscrits à M. Walckenaër, Azara lui donna un calque de sa carte générale, et lorsque ce savant lui eut mandé à Madrid qu’un libraire français, devenu possesseur de la traduction de ses voyages faite sous ses yeux, se chargeait d’en être l’éditeur, il lui envoya les cartes qui composent l’atlas et y joignit des additions et des corrections qu’il le priait d’incorporer dans l’ouvrage. Cuvier et M. Walckenaër l’enrichirent de leurs notes ; il a été mis à contribution par plusieurs auteurs qui ont écrit sur les