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son Droit maritime de l’Europe, ouvrage d’un ordre élevé et qui lui fit le plus grand honneur. L’académie de Florence l’ayant admis au nombre de ses membres, il y lut, le 10 septembre 1795, une dissertation dans laquelle il prouve que les Français ont les premiers fait usage de la boussole. Après la réunion qu’on pouvait croire définitive du comté de Nice a la France, Azuni vint à Paris, où sa réputation l’avait précédé. Il y reçut un accueil distingué des savants, entre autres de Laplace et de Sonnini, qu’il a cités avec reconnaissance dans plusieurs endroits de ses ouvrages. Adjoint par le ministre de l’intérieur à la commission chargée de réunir les éléments d’un nouveau code de commerce, il s’occupa spécialement de la partie maritime. En 1807, il fut nommé président au tribunal d’appel de Gênes ; et l’année suivante, sur la présentation des électeurs figurions, il fut désigné membre du corps législatif. Lors de la discussion préparatoire du code criminel, en 1810, il inclina constamment pour la diminution des supplices, et demanda que la peine de mort fût réservée pour les grands crimes. Par suite des événements de 1814, la république de Gênes ayant été rétablie momentanément sur ses anciennes bases, Azuni resta sans emploi ; et, comme il n’avait fait aucune économie, il se trouva dans la dure nécessité de vendre pièce à pièce sa précieuse bibliothèque pour subsister avec sa famille[1]. Malgré la reconnaissance qu’il portait à la France pour le bienveillant accueil qu’il y avait reçu, jamais il n’avait cessé de tourner ses regards vers sa patrie ; on peut voir, dans la préface de son Histoire de la Sardaigne, qu’il nourrissait l’espérance d’y terminer sa carrière. Les obstacles qui s’opposaient à l’accomplissement de ses vœux s’aplanirent enfin, et il s’embarqua pour Cagliari, où il retrouva les honneurs et les distinctions dont il avait été privé par d’injustes préventions. Accueilli par le duc de Genevois (Charles-Félix, depuis roi de Sardaigne), qui se déclara son protecteur, il fut nommé juge au consulat et directeur de la bibliothèque de l’université. Azuni partagea ses derniers jours entre ses devoirs et la culture des lettres. Il mourut à la fin de janvier 1827. Chevalier de la Légion d’honneur et de l’ordre de la Réunion, il était associé des principales académies d’Italie et de celles de Marseille et de Goettingue. On a de lui : 1° Dizionario universale ragionato della giurisprudenza mercantile, Nice, 1786-88, 1 vol. in-4° ; 2e édit., Livourne, 1822. C’est l’ouvrage le plus complet qu’il y ait sur cette matière. 2° Sistema universale dei principi del dritto maritime d’Europa, Florence, 1705, -1 vol. in-8° ; réimprimé plusieurs fois en italien, et traduit en français sur la première édition, par J.-M. Digeon, Paris, 1797, 2 vol. in-8°. L’auteur, mécontent de son travail, le refondit entièrement, et le publia lui-même en français sous le titre de Droit maritime de l’Europe, Paris, 1805, 2 vol. in-8°. 5° Essai sur l’histoire de la Sardaigne, Paris, 1798, in-8°. La seconde édition. augmentée de plus de moitié, est intitulée : Histoire géographique, politique et naturelle de la Sardaigne, ibid., 1802, 2 vol. in-8°, avec une carte, la plus détaillée et la plus exacte qu’on eût encore de cette île. Le 1er volume contient la géographie de la Sardaigne, son histoire sous les différents peuples qui l’ont successivement possédée ; et enfin le tableau de son commerce, précédé de considérations sur les réformes dont l’adoption pourrait rendre ce pays, si fertile, l’un des plus riches et des plus florissants du monde. Le 2e volume, qui traite exclusivement de l’histoire naturelle, est orné de quelques planches représentant les plantes et les animaux les plus rares. Dans la préface, Azuni reconnaît qu’il s’est servi des notes que Sonnini lui avait fournies pour cette partie de son travail. 1° Dissertation sur l’origine de la boussole, Paris, 1805 ; et, avec les additions, ibid., 1809, in-8°. Publiée d’abord en italien, cette dissertation fut ensuite traduite par l’auteur en français. Après avoir établi que la boussole n’a pas été connue des anciens, et que les Chinois ainsi que les Arabes l’ont reçue des Européens, Azuni démontre que si les Français ne l’ont pas découverte, ils en ont fait usage les premiers l’époque des croisades. Cette opinion fut attaquée par Hager (voy. ce nom) avec une vivacité réellement inexcusable ; et les journalistes italiens, entraînés par un sentiment patriotique, se prononcèrent en faveur de l’orientaliste milanais. Mais Azuni l’a réfuté victorieusement dans une lettre à Moscati, qui se trouve à la suite de l’édition française de 1809. Les différentes opinions sur l’origine de la boussole ont été présentées avec beaucoup d’exactitude à l’article Gioia. (Voy. ce nom.) 5° Origine du droit et de la législation maritimes, avec des observations sur le consulat de la mer, Paris, 1810, in-8°. 6° Mémoires pour servir à l’histoire des voyages maritimes des anciens navigateurs de Marseille, Gênes, 18 5, in-8°. Précédemment Azuni avait inséré, dans le 1er volume des Mémoires de l’académie de Marseille, deux notices sur les voyages de Pythéas. (Voy. ce nom.) 7° Recherches pour servir à l’histoire de la piraterie, avec un précis des moyens propres à l’extirpation des pirates barbaresques, Gênes, 1810, in-8°. 8° Système universel des armements en course et des corsaires en temps de guerre, suivi d’un précis des moyens propres à diminuer la navigation des neutres, ibid., 1817, in-8°. 9° Soprà l’Amministrazione sanitaria in tempo di pesto, Cagliari, 1820, in-8°.

W-s.


AZYMET-GUÉRAI, 36e kan, fils de Feth-Guéraï, kan de Crimée pendant la guerre des Russes avec les Turcs, fut choisi par le divan pour remplacer Crym-Guéraï, au commencement d’octobre 1761. La conduite des Russes à l’égard de plusieurs de ses prédécesseurs avait indisposé Azymet, et il voulut renvoyer le consul qu’ils entretenaient à Baghtchéh-Séraï. Ceux-ci cherchèrent à se concilier son amitié par des présents ; ils lui offrirent de magnifiques pelleteries et 1 000 roubles. L’avidité et le goût du repos déterminèrent le kan à recevoir ces présents et a vivre en bonne intelligence avec ses voisins. Au mois de mars 1765, il reçut ordre de se rendre à Constantinople pour prêter le serment ac-

  1. Il avait épousé une demoiselle de Marseille dont il n’a pas eu d’enfant.