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CARLOVINGIENS.

Avec ce goût pour la littérature et pour les traditions de Rome, il ne faut pas s’étonner que Charlemagne et son fils Louis aient aimé à s’entourer d’étrangers, de lettrés de basse condition. « Il advint qu’au rivage de Gaule débarquèrent avec des marchands bretons, deux Scots d’Hibernie, hommes d’une science incomparable dans les écritures profanes et sacrées. Ils n’étalaient aucune marchandise, et se mirent à crier chaque jour à la foule qui venait pour acheter : « Si quelqu’un veut la sagesse, qu’il vienne à nous, et qu’il la reçoive, nous l’avons à vendre… » Enfin ils crièrent si longtemps, que les gens étonnés, ou les prenant pour fous, firent parvenir la chose aux oreilles du roi Charles, amateur toujours passionné de la sagesse. Il les fit venir en toute hâte, et leur demanda s’il était vrai, comme la renommée le lui avait appris, qu’ils eussent avec eux la sagesse. Ils dirent : « Nous l’avons, et, au nom du Seigneur, nous la donnons à ceux qui la cherchent dignement. » Et, comme il leur demandait ce qu’ils voulaient en retour, ils répondirent : « Un lieu commode, des créatures intelligentes, et ce dont on ne peut se passer pour accomplir le pèlerinage d’ici-bas, la nourriture et l’habit. » Le roi, plein de joie, les garda d’abord avec lui quelque peu de temps. Puis, forcé d’entreprendre des expéditions militaires, il ordonna à l’un d’eux, nommé Clément, de rester en Gaule, lui confia un assez grand nombre d’enfants de haute, de moyenne et de basse condition, et leur fit donner des aliments selon leur besoin, et une habitation commode. L’autre (Jean Mailros, disciple de Bède), il