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HISTOIRE DE FRANCE

Domitien rendait la justice avec assiduité et intelligence ; souvent il cassait les sentences des centumvirs, suspects d’être influencés par l’intrigue[1]. Adrien consultait sur les causes soumises à son jugement, non ses amis, mais les jurisconsultes. Septime-Sévère lui-même, ce farouche soldat, ne se dispensa pas de ce devoir, et, dans le repos de sa villa, il jugeait et entrait volontiers dans le détail minutieux des affaires. Julien est de même cité pour son assiduité à remplir les fonctions de juge. Ce zèle des empereurs pour la justice civile balançait une grande partie des maux de l’Empire ; il devait inspirer une terreur salutaire aux magistrats oppresseurs, et remédier dans le détail à une infinité d’abus généraux.

Même sous les plus mauvais empereurs, le droit civil prit toujours d’heureux développements. Le jurisconsulte Nerva, aïeul de l’empereur de ce nom (disciple du républicain Labéon, l’ami de Brutus et le fondateur de l’école stoïcienne de jurisprudence), fut le conseiller de Tibère. Papinien et Ulpien fleurirent au temps de Caracalla et d’Hélagabal, comme Dumoulin, l’Hôpital, Brisson, sous Henri II, Charles IX et Henri III. Le droit civil, se rapprochant de plus en plus de l’équité naturelle, et par conséquent du sens commun des nations, devint le plus fort lien de l’Empire et la compensation de la tyrannie politique.

Cette tyrannie des princes, celle des magistrats bien autrement onéreuse, n’étaient pas la cause principale

  1. App. 18.