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MÉROVINGIENS

Ballomer (le roi appelait ainsi Gondovald), homme toujours perfide et qui ne tiens rien de ce que tu promets ! » Boson lui répondit : « Toi, seigneur et roi, tu es assis sur le trône royal, et personne n’a osé répondre à ce que tu dis ; je soutiens que je suis innocent de cette affaire. S’il y a quelqu’un, égal à moi, qui m’impute en secret ce crime, qu’il vienne publiquement et qu’il parle. Pour toi, très pieux roi, remets le tout au jugement de Dieu ; qu’il décide, lorsqu’il nous aura vu combattre en champ clos. » À ces paroles, comme tout le monde gardait le silence, le roi dit : « Cette affaire doit exciter tous les guerriers à repousser de nos frontières un étranger dont le père a tourné la meule, et, pour dire vrai, son père a manié la carde et peigné la laine. » Et, quoiqu’il se puisse bien faire qu’un homme ait à la fois ces deux métiers, un des députés répondit à ce reproche du roi : « Tu prétends donc que cet homme a eu deux pères, un cardeur et un meunier ? Cesse, ô roi, de parler si mal ; car on n’a point ouï dire qu’un seul homme, si ce n’est en matière spirituelle, puisse avoir deux pères. » Comme ces paroles excitaient le rire d’un grand nombre, un autre député dit : « Nous te disons adieu, ô roi, puisque tu ne veux pas rendre les cités de ton neveu, nous savons que la hache est entière qui a tranché la tête à tes frères ; elle te fera bientôt sauter la cervelle » ; et ils se retirèrent ainsi avec scandale. À ces mots le roi, enflammé de colère, ordonna qu’on leur jetât à la tête pendant qu’ils se retiraient du fumier de cheval, des herbes pourries,