Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 1.djvu/437

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
379
ÉCLAIRCISSEMENTS

pre et fut entré vainqueur à Trèves, il le pressa de prières et de dénonciations contre Priscillien et ses complices : l’empereur ordonna d’amener au synode de Bordeaux tous ceux qu’avait infectés l’hérésie. Ainsi furent amenés Instantius et Priscillien (Salvianus était mort). Les accusateurs Idace et Ithacius les suivirent. J’avoue que les accusateurs me sont plus odieux pour leurs violences que les coupables eux-mêmes. Cet Ithacius était plein d’audace et de vaines paroles, effronté, fastueux, livré aux plaisirs de la table… Le misérable osa accuser du crime d’hérésie l’évêque Martin, un nouvel apôtre ! Car Martin, se trouvant alors à Trèves, ne cessait de poursuivre Ithacius pour qu’il abandonnât l’accusation, de supplier Maxime qu’il ne répandit point le sang de ces infortunés : c’était assez que la sentence épiscopale chassât de leurs sièges les hérétiques ; et ce serait un crime étrange et inouï qu’un juge séculier jugeât la cause de l’Église. Enfin, tant que Martin fut à Trèves, on ajourna le procès ; et, lorsqu’il fut sur le point de partir, il arracha à Maxime la promesse qu’on ne prendrait contre les accusés aucune mesure sanglante. »


Ex Sulpicii Severi Dialogo III :


« Sur l’avis des évêques assemblés à Trèves, l’empereur Maxime avait décrété que des tribuns seraient envoyés en armes dans l’Espagne, avec de pleins pouvoirs pour rechercher les hérétiques, et leur ôter la vie et leurs biens. Nul doute que cette tempête n’eût enveloppé aussi une multitude d’hommes pieux ; la distinction n’étant pas facile à faire, car on s’en rapportait aux yeux, et on jugeait d’un hérétique sur sa pâleur ou son habit, plutôt que sur sa foi. Les évêques sentaient que cette mesure ne plairait pas à Martin ; ayant appris qu’il arrivait, ils obtinrent de l’empereur l’ordre de lui interdire l’approche de la ville s’il ne promettait de s’y tenir en paix avec les évêques. Il éluda adroitement cette demande, et promit de venir en paix avec Jésus-Christ. Il entra de nuit, et se rendit à l’église pour prier ; le lendemain il vient au palais… Les évêques se jettent aux genoux de l’empereur, le suppliant avec larmes de ne pas se laisser entraîner à l’influence d’un seul homme… L’empereur chassa Martin de sa présence. Et bientôt il envoya des assassins tuer ceux pour qui le saint homme avait intercédé. Dès que Martin l’apprit, c’était la nuit, il court au palais. Il promet que, si on fait grâce, il communiera avec les évêques, pourvu qu’on