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LE DUC D’ORLÉANS, LE DUC DE BOURGOGNE

sermon d’un moine augustin contre la reine et le duc. La reine pourtant était présente. Le saint homme ne parla qu’avec plus de violence, et probablement sans bien savoir qui il servait par cette violence. Il n’y a pas de meilleur instrument pour les factions que ces fanatiques qui frappent en conscience. Dans sa harangue, il attaquait pêle-mêle les prodigalités de la cour, les abus, les nouveautés en général, la danse, les modes, les franges, les grandes manches[1]. Il dit, en face de la reine, que sa cour était le domicile de dame Vénus, etc.[2].

On en parla au roi, qui, loin de se fâcher, voulut aussi l’entendre. Devant le roi, il en dit encore plus : que les tailles n’avaient servi à rien ; que le roi même était vêtu du sang et des larmes du peuple ; que le duc (il ne le désignait pas autrement) était maudit, et que, sans doute, Dieu ferait passer le royaume dans une main étrangère[3].

Le duc d’Orléans, si violemment attaqué, n’essayait point de regagner les esprits. On l’accusait de prodigalité ; il n’en fut que plus prodigue ; il y avait trop peu d’argent pour la guerre, il y en avait assez pour les fêtes, les amusements. Éloigné si longtemps du gouvernement par ses oncles, sous prétexte de jeunesse, il restait jeune en effet ; il avait passé la trentaine, et

  1. « Loricatis, fimbriatis et manicatis vestibus. » (Religieux.)
  2. « Domina Venus. » (Idem.) — Cet Augustin, qui prêcha contre le duc d’Orléans, lui avait dédié un livre qui, peut-être, n’avait pas été assez payé.
  3. « Te induere de substantia, lacrimis et gemitibus miserrimæ plebis. » (Idem.)