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HISTOIRE DE FRANCE

recteur, les gens du Parlement. Malheur à ceux qui l’auraient porté de travers[1] !

Le chaperon fut envoyé aux autres villes, et presque toutes le prirent. Néanmoins aucune n’entra sérieusement dans le mouvement de Paris. Les cabochiens, ne trouvant aucune résistance, mais n’étant aidés de personne, furent obligés de recourir à des moyens expéditifs pour faire de l’argent. Ils demandèrent au dauphin l’autorisation de prendre soixante bourgeois, gens riches, modérés et suspects. Ils les rançonnèrent.

On avait commencé par emprisonner les courtisans, les seigneurs. Déjà on en venait aux bourgeois. On ne pouvait deviner où s’arrêteraient les violences. Les petites gens prenaient peu à peu goût au désordre ; ils ne voulaient plus rien faire que courir les rues avec le chaperon blanc ; ne gagnant plus, il fallait bien qu’ils prissent. Le pillage pouvait commencer d’un moment à l’autre.

Les gens de l’Université, qui avaient mis tout en mouvement sans savoir ce qu’ils faisaient, n’étaient pas les moins effrayés. Ils avaient cru accomplir la réforme en compagnie du duc de Bourgogne, du corps de ville et des bourgeois les plus honorables. Et voilà qu’il ne leur restait que les bouchers, les valets de boucherie, les écorcheurs. Ils frémissaient de se ren-

  1. Le dauphin ayant fait l’espièglerie de tirer en bas une corne de son chaperon, de manière à ce qu’elle figurât une bande (signe des Armagnacs), les bouchers faillirent éclater : « Regardez, disaient-ils, ce bon enfant de dauphin, il en fera tant qu’il nous mettra en colère. » (Juvénal.)