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L’ANGLETERRE. — AZINCOURT

sont héritiers. Le fils de Lancastre était d’autant plus impatient de porter la couronne à son tour, qu’il avait, par une victoire, raffermi cette couronne sur la tête de son père. Lui aussi, il traitait avec les Français[1], mais à part et pour son compte.

Ce jeune Henri plaisait au peuple. C’était une svelte et élégante figure, comme on les trouve volontiers dans les nobles familles anglaises. C’était un infatigable fox-hunter, si leste qu’il pouvait, disait-on, chasser le daim à pied. Il avait fait longtemps les petites et rudes guerres des Galles, la chasse aux hommes.

Il se lia aux mécontents, se faufila parmi les lollards, courant leurs réunions nocturnes, dans les champs[2], dans les hôtelleries. Il se fit l’ami de leur chef, du brave et dangereux Oldcastle, celui même que Shakespeare, ennemi des sectaires de tout âge[3], a malicieusement transformé dans l’ignoble Falstaff. Le père n’ignorait rien. Mais, enfermer son fils, c’eût été se déclarer contre les lollards, dont il voulait justement se rapprocher à cette époque. Cependant, ce roi, malade, lépreux, chaque jour plus solitaire et plus irritable, pouvait être jeté par ses craintes dans quelque résolution violente. Son fils cherchait à le rassurer par une affectation de vices et de désordres, par des folies de jeunesse, adroitement calculées. On dit qu’un jour

  1. Le fils négociait avec le parti de Bourgogne, tandis que le père se rapprochait du parti d’Orléans.
  2. C’était comme nos écoles buissonnières du seizième siècle.
  3. Il est dit toutefois dans Henri V que Falstaff parlait « contre la prostituée de Babylone ». App. 160