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HISTOIRE DE FRANCE

D’Abbeville, l’armée des princes avait de son côté remonté la Somme jusqu’à Péronne, pour disputer le passage. Sachant qu’Henri était passé, ils lui envoyèrent demander, selon les us de la chevalerie, jour et lieu pour la bataille, et quelle route il voulait tenir. L’Anglais répondit, avec une simplicité digne, qu’il allait droit à Calais, qu’il n’entrait dans aucune ville, qu’ainsi on le trouverait toujours en plein champ, à la grâce de Dieu. À quoi il ajouta : « Nous engageons nos ennemis à ne pas nous fermer la route et à éviter l’effusion du sang chrétien. »

De l’autre côté de la Somme, les Anglais se virent vraiment en pays ennemi. Le pain manqua ; ils ne mangèrent pendant huit jours que de la viande, des œufs, du beurre, enfin ce qu’ils purent trouver. Les princes avaient dévasté la campagne, rompu les routes. L’armée anglaise fut obligée, pour les logements, de se diviser entre plusieurs villages. C’était encore une occasion pour les Français : ils n’en profitèrent pas. Préoccupés uniquement de faire une belle bataille, ils laissaient l’ennemi venir tout à son aise. Ils s’assemblaient plus loin, près du château d’Azincourt, dans un lieu où la route de Calais se resserrant entre Azincourt et Tramecourt, le roi serait obligé, pour passer, de livrer bataille.

Le jeudi 24 octobre, les Anglais ayant passé Blangy[1] apprirent que les Français étaient tout près et crurent

  1. « Comme il fut dit au roy d’Angleterre que il avoit passé son logis, il s’arrêta et dit : « Jà Dieu ne plaise, entendu que j’ai la cotte d’armes vestue, que je dois retourner arrière. » Et passa outre ». (Lefebvre.)