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HISTOIRE DE FRANCE

leur vaste caparaçon de fer, s’étaient profondément enfoncés des quatre pieds dans les terres fortes ; ils y étaient parfaitement établis, et ils ne s’en dépêtrèrent que pour avancer quelque peu au pas.

Tel est l’aveu des historiens du parti anglais, aveu modeste qui fait honneur à leur probité.

Lefebvre, Jean de Vaurin et Walsingham[1] disent expressément que le champ n’était qu’une boue visqueuse. « La place estoit molle et effondrée des chevaux, en telle manière que à grant peine se pouvoient ravoir hors de la terre, tant elle estoit molle. »

« D’autre part, dit encore Lefebvre, les Franchois estoient si chargés de harnois qu’ils ne pouvoient aller avant. Premièrement, estoient chargés de cottes d’acier, longues, passants les genoux et moult pesantes, et pardessous harnois de jambes, et pardessus blancs harnois, et de plus bachinets de caruail… Ils étoient si pressés l’un de l’autre, qu’ils ne pouvoient lever leurs bras pour férir les ennemis, sinon aucuns qui estoient au front. »

Un autre historien du parti anglais nous apprend que les Français étaient rangés sur une profondeur de trente-deux hommes, tandis que les Anglais n’avaient que quatre rangs[2]. Cette profondeur énorme des Français ne leur servait à rien ; leurs trente-deux rangs étaient tous, ou presque tous, de cavaliers ; la plupart, loin de pouvoir agir, ne voyaient même pas

  1. Les fantassins même avaient peine à marcher : « Propter soli mollitiem… per campum lutosum. » (Walsingham.)
  2. Titus Livius.