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HISTOIRE DE FRANCE

profondément passionnée[1]. C’est l’alouette, rien de plus[2]. Ce n’est pas le rossignol.

Telle fut en général notre primitive et naturelle France, un peu légère peut-être pour le sérieux d’aujourd’hui. Telle elle fut en poésie comme elle est en vins, en femmes. Ceux de nos vins que le monde aime et recherche comme français ne sont, il est vrai, qu’un souffle, mais c’est un souffle d’esprit. La beauté française, non plus, n’est pas facile à bien saisir ; ce n’est ni le beau sang anglais, ni la régularité italienne ; quoi donc ? le mouvement, la grâce, le je ne sais quoi, tous les jolis riens.

Autre temps, autre poésie. N’importe ; celle-là subsiste ; rien, en ce genre, ne l’a surpassée. Naguère encore, lorsque ces chants étaient oubliés eux-mêmes, il a suffi, pour nous ravir, d’une faible imitation, d’un infidèle et lointain écho[3].

  1. Il y a pourtant un vif mouvement de passion dans les vers suivants :

    Dieu ! qu’il la fait bon regarder,
    La gracieuse, bonne et belle !
    ...........
    Qui se pourroit d’elle lasser ?
    Tous jours sa beauté renouvelle.
    Dieu ! qu’il la fait bon regarder,
    La gracieuse, bonne et belle !
    Par deçà, ni delà la mer,
    Ne scays dame ni demoyselle
    Qui soit en tout bien parfait telle.
    C’est un songe que d’y penser !
    Dieu ! qu’il la fait bon regarder.

    (Charles d’Orléans.)App. 183.
  2. App. 184.
  3. Peu m’importe de savoir l’auteur des vers de Clotilde de Surville ; il me suffit de savoir que Lamartine, très jeune, les avait retenus par cœur. Personne n’ignore maintenant que le second volume est l’ouvrage de l’ingénieux Nodier.