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HISTOIRE DE FRANCE

investi. Henri V s’en était approché avec une extrême lenteur. Non content d’avoir derrière lui deux grandes colonies anglaises, Harfleur et Caen, il avait complété la conquête de la basse Normandie par la prise de Falaise, de Vire, de Saint-Lô, de Coutances et d’Évreux. Il tenait la Seine, non seulement par Harfleur, mais par le Pont-de-l’Arche. Il avait déjà rétabli un peu d’ordre, rassuré les gens d’Église, invité les absents à revenir, leur promettant appui, et déclarant qu’autrement il disposerait de leurs terres ou de leurs bénéfices. Il rouvrit l’Échiquier et les autres tribunaux, et leur donna pour président suprême son grand trésorier de Normandie. Il réduisit presque à rien l’impôt du sel, « en l’honneur de la sainte Vierge[1] ».

Peu de rois avaient été plus heureux à la guerre, mais la guerre était son moindre moyen. Henri V était, ses actes en témoignent, un esprit politique, un homme d’ordre, d’administration, et en même temps de diplomatie. Il avançait lentement, parlementant toujours, exploitant toutes les peurs, tous les intérêts, profitant à merveille de la dissolution profonde du pays auquel il avait à faire, fascinant de sa ruse, de sa force, de son invincible fortune, des esprits vacillants qui n’avaient plus rien où se prendre, ni principe ni espoir ; personne en ce malheureux pays ne se fiait plus à personne, tous se méprisaient eux-mêmes.

Il négociait infatigablement, toujours, avec tous ;

  1. Rymer.