Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/99

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Granet, l’un des principaux vainqueurs du 10 août, sont visiblement écrites par d’ardents républicains, qui se trompent, il est vrai, sur l’esprit de la Montagne, qui suivent l’erreur girondine et s’imaginent que les Montagnards sont la faction d’Orléans.

Le Comité de salut public fut saisi, en lisant ces lettres, de la plus amère douleur. Que faire ? et comment les défendre ? Le ministre Garat, qui était présent, rappela le mot d’Aristide dans ses querelles acharnées avec Thémistocle : « Ô Athéniens, vous ne serez jamais tranquilles que vous ne nous jetiez tous deux au gouffre où l’on jette les condamnés ! ». Il fit souvenir encore de l’expédient proposé par une section : Que la Gironde se retirât, et que la Montagne envoyât des otages, en même nombre, aux départements. Cambon, Barère, Delmas, saisirent avidement cette idée. Danton se leva, les larmes aux yeux : « Je m’offre le premier, dit-il, pour aller en otage à Bordeaux. Proposons-le à la Convention. » Barère sortit à l’instant même. Il parla, non à la tribune, mais de banc en banc, pour tâter les chefs, surtout Robespierre. Tout fut manqué. D’un mot amer, d’un seul mot dit en ricanant, il rendit suspect, impossible, le dévouement de Danton : « Ce n’est, dit-il, rien qu’un piège que l’on tend aux patriotes. »

L’expédient était hasardeux, sans nul doute. Mais enfin, que faire ? Par quel autre moyen empêcher la guerre civile ? Robespierre n’en disait aucun. Il croyait sans doute encore à l’efficacité de son insur-