Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/194

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dent de la famille impériale de Russie, l’historien Karamsin, secrètement envoyé à Paris, peut-être pour empêcher l’alliance polonaise, fut saisi d’admiration pour la vigueur de Robespierre. L’exterminateur des factions eut dès lors toute son estime. Et quand, revenu à Pétersbourg, il apprit le 9 thermidor, il versa d’abondantes larmes.

Si les prêtres et les rois, dans leur langage officiel, maudissent le chef des Jacobins, c’est leur rôle, c’est leur métier ; ils doivent parler ainsi. Dans leur for intérieur, c’est tout autre chose. Celui qui tua Clootz et Chaumette, la Commune de Paris, et brisa le nouvel autel, sa créa un titre éternel auprès du clergé. Et celui qui tua Danton, Desmoulins, la voix de la République et la vie de la Montagne, mérita par cela seul la reconnaissance des rois.

Tous les gouvernements sont frères. Et Robespierre fut un gouvernement. Il est résulté de là deux choses :

La tradition gouvernementale de l’Europe lui est restée favorable, comme à l’homme qui transformait la Révolution ;

Et la tradition révolutionnaire lui est restée favorable, comme à l’homme en qui fut le gouvernement de la République.

Qui tua la République ? Son gouvernement. La forme extermina le fond ; elle chercha l’ordre et le calme dans l’extinction des forces vives. Elle brisa à la fois la liberté et la conscience. Mais c’est jus-