Page:Millevoye - Œuvres complètes de Millevoye, I, 1837, éd. Pongerville.djvu/73

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Laissé tomber le travail commencé ?
Tu me dis j’aime, et d’une voix si tendre !
Ce mot charmant, pour moi seul l’as-tu dit ?
Que sais-je ? Un autre avant moi l’entendit
Peut-être !... Eh bien ! je ne puis plus l’entendre.
Pardonne, hélas ! dans mon trouble fatal,
Je te parais injuste, ingrat ; mais j’aime !
Ah ! songe bien que pour l’amour extrême
Un souvenir est encore un rival.




PRIÈRE A LA NUIT.


Du jour sœur paisible et voilée,
Qui, sur la terre consolée
Versant le baume du repos,
Couronnes ta tête étoilée
D’un diadème de pavots,
Nuit ! pardonne si ma lyre,
Frémissant au gré du zéphyre
Parmi les saules de ces bords,
Ose un instant par ses accords
Troubler la paix de ton empire.
J’ai vu le disque étincelant
S’éteindre aux humides demeures,
Et le groupe léger des Heures
Suivre ton char en se voilant.
Tout dort; et moi, seul, en silence,
Aux lueurs d’un pâle flambeau,
Devant ton trône je balance
Des suppliants l’humble rameau.
Je n’invoque point ton mystère
Pour aller ravir à sa mère
Une vierge au cœur ingénu,
Qui, solitaire et sans défense,