Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/65

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en frais de satire et m’avait appris ce proverbe : Col patenzia et la supa si chiavarebbe una mosca. Je pris un morceau de beurre frais qu’on nous avait apporté avec des radis, et grâce à ce secours, je renouvelai mes efforts. Faustine s’arme de courage, résiste sans fuir ; la tête de ma colonne force la barrière ; je redouble, le bélier pénètre, la muraille s’entr’ouvre, les désirs escaladent la brèche et s’y logent en arborant le drapeau des plaisirs. Nous trouvions ce jeu si doux que nous avions de la peine à le quitter ; mais la crainte que la fille de l’auberge ne nous surprît en apportant ce qu’on nous préparait pour déjeuner, nous força de nous rhabiller.

Je pris la chemise de Faustine, qui s’affubla de la mienne ; elle se chargea de ma coiffure, moi de la sienne, et quand on vint nous servir, elle offrait aux yeux un petit abbé, et je paraissais une assez jolie fille. Faustine, pour se conformer à son nouveau costume, prit l’air d’un jeune étourdi, et y réussit mieux que moi quand je voulus prendre l’air de réserve convenable à mon habit. La servante qui porta notre déjeuner avait la gorge ferme, la jambe fine, le bas bien tiré et la jupe courte, comme l’ont d’ordinaire nos jolies Venaissines. Faustine la lutina ; Javotte paya d’une tape l’agilité de ses mains. Le nouvel abbé ne se rebuta pas, et levant sa jupe par derrière, toucha l’endroit sensible.

— Qu’est-ce donc ? petit fripon, sans le respect que j’ai pour mademoiselle votre sœur, je vous corrigerais de la bonne façon ; voyez un peu le beau morveux !

— Ah ! ne vous gênez pas, repris-je en riant,