Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/70

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en charité ; mais je ne désempare pas de la chambre de mon frère, lui seul peut me protéger contre l’impudicité de votre mari.

— Couche-toi, ma sœur, me dit Faustine, je me mettrai dans un fauteuil près de ton lit pour te défendre ; j’espère que madame y voudra bien consentir, et souffrir que nous reposions jusqu’au point du jour. Alors nous quitterons une maison où l’innocence est si peu respectée.

La dame, après quelques excuses maladroites, sortit et ayant barricadé nos portes, nous nous jetâmes dans les bras l’un de l’autre, et nous savourâmes à loisir l’ivresse des plaisirs dont nous avions pris un échantillon dans l’auberge. Le lendemain, à la pointe du jour, ayant repris les habits de notre sexe, nous partîmes sans prendre congé de nos hôtes libidineux, et notre soupente raccommodée nous ramena chez ma tante, où j’achevai de passer voluptueusement la fin des vacances, après avoir assisté aux noces de mon aimable cousine, dont le mari, nerveusement conformé, ne s’aperçut point que j’avais frayé le sentier qu’il parcourut encore avec peine.

Nous avions repris nos forces pendant l’histoire du prélat, et tour à tour pendant la soirée nous nous enivrâmes de tous les plaisirs qu’offrent la nature et la débauche à des gens qui, pleins de vigueur et vides de préjugés, loin de rien refuser à leurs désirs, les irritent par la recherche de toutes les possibilités voluptueuses.

À quelques jours de là, mon prélat, près duquel je remplissais avec zèle les fonctions dont