Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/75

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me choisit pour écuyer, et l’évêque prit le bras de la chanoinesse, et lui parla de manière à la prévenir en ma faveur.

La mère, cependant, me questionna sur les mœurs de Pégu, sur la tournure des belles, sur les procédés qu’on y suivait en amour ; je l’assurai que les femmes grosses y étaient le plus recherchées (elle l’était) ; que les hommes ne se permettaient aucune avance vis-à-vis d’elles, de crainte d’être importuns ; mais qu’ils répondaient avec transport à celles que les belles leur faisaient.

— Comment, si j’étais Péguane, si vous me trouviez aimable, vous ne me le diriez pas ?

— J’aurais trop peur de vous offenser.

— Comment donc faut-il que la femme se conduise pour enhardir l’homme pour lequel elle se sent du goût ?

— Elle le regarde en baisant le bout du doigt de sa main gauche, et le cavalier s’approche avec timidité.

— Et la dame alors ?

— Elle porte la main droite sur son cœur.

— Comme cela ?

— Précisément.

— Je fais donc bien ?

— À ravir.

— Et le cavalier ?

— S’il est seul avec la belle, il se jette à ses genoux, obéit à ses ordres sans oser les prévenir ; mais s’il est devant témoins, il feint de ne rien entendre, et gémit les yeux baissés.

— Vous les avez à présent ?