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LE RIDEAU LEVÉ


par l’autre. Quelle volupté nous ressentions ! Vernol ne savait plus où il en était ; nous jouissions de cette félicité pure qui se sent sans pouvoir l’exprimer ni la concevoir ; nos plaisirs étaient à leur comble ; il en éprouva le premier l’excès : il déchargeait ; ses bras, qui m’entrelaçaient, se relâchèrent ; je précipitai mes mouvements, je l’atteignis, et me laissant aller sur lui, il connut que je jouissais des mêmes délices. Serrés, collés l’un sur l’autre, nous savourions ce voluptueux anéantissement qui n’est pas moins enchanteur que le plaisir qui nous l’avait procuré ; mais plus tôt rétablie que lui, je me vis forcée de l’engager à se servir encore de sa main et de son doigt.

Nous répétions tous les jours cet agréable exercice ; j’allais dans son lit, ou il venait dans le mien ; partout où nous nous pouvions réunir en sûreté pendant le jour, nous le recommencions, ou nous n’en prenions que l’ombre. La nuit, où nous ne pouvions être ensemble, toute pleine de son image, je lui consacrais les plaisirs qu’elle faisait naître ; il en faisait autant de son côté ; nous nous rendions compte le matin, et nous réalisions nos illusions nocturnes.

Étonné dès les premiers jours de tout ce que je lui avais appris, il avait désiré que je lui dise par quel moyen j’en avais eu connaissance, mais ne croyant pas à propos de lui rendre compte d’abord de ce que j’avais