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LE RIDEAU LEVÉ


l’un et l’autre jusqu’à ce que vous veniez, car vous en aurez sûrement besoin.

Je n’avais rien perdu de ce discours. Rose vint, m’entraîna, courut chez sa mère et obtint facilement pour elle et Vernol ce qu’elle lui demandait. Je la quittait et fus passer le reste de la journée chez une parente. Pendant ce temps-là mon père fut donner ses soins aux arrangements qu’il projetait.

La nuit, quand je fus dans ses bras, je présumai qu’il me rendrai compte de ce qu’il avait dit à Rose, et de ses desseins. Indécise avec moi-même, je ne voulus pas lui en parler la première, ni lui faire connaître que je l’avais entendu. Le cœur me battait ; mais il ne m’en ouvrit pas la bouche.

Le lendemain, après midi, une voiture se rendit à notre porte, nous prit et nous conduisit dans une maison charmante, à quelque distance de la ville ; je ne la lui connaissais pas. Je jugeai qu’elle appartenait à quelqu’un de ses amis, qui la prêtait. Vernol avait cherché à relever ses attraits naturels. Rose et moi nous étions dans un déshabillé galant. Instruit par sa sœur, il avait une politesse plus aisée et quelque chose de plus assuré, qui lui était avantageux. Nous arrivâmes sur les quatre heures ; il faisait un temps admirable et très doux. Nous fîmes plusieurs tours dans les jardins, qui étaient vraiment dessinés par Nertumme, et non de ces assemblages fantasques où la bizarrerie semble avoir