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LE RIDEAU LEVÉ

— Soyez-en assuré, cher papa, mais achevez-la, je vous prie, tout entière. Ne craignez-vous pas de lui faire un enfant, si vous ne vous retirez pas toujours à temps ? en est-on absolument le maître ? n’est-on pas quelquefois emporté par le plaisir, et la crainte qu’on peut avoir de ses suites n’en diminue-t-elle pas l’étendue et l’excès ?

— Ah ! ma fille, jusqu’où ton imagination curieuse ne va-t-elle pas ? Je vois bien que je ne dois rien te cacher. Si je ne te garantissais pas de tout événement, je ferais, sans doute, une folie de t’éclairer, mais je ne risque rien avec toi, et ta raison est au delà de ton âge.

Apprends donc que la semence qui n’est point dardée dans la matrice ne peut rien produire ; qu’elle ne peut s’y rendre lorsqu’on intercepte le sucement qui lui est ordinaire. Cela reconnu, plusieurs femmes ont imaginé de repousser par un mouvement interne, la semence, au moment où elles croyaient leur amant dans les délices du plaisir ; mais pour qu’elles aient cette liberté d’esprit, il ne faut pas qu’elles le partagent, privation bien dure ! Encore rien n’est-il moins assuré. Des hommes ont pensé qu’en se retirant presque à l’entrée, il n’y avait rien à craindre, mais ils se trompent, la matrice étant une pompe avide ; d’ailleurs, il y a des hommes qui, emportés par les délicieuses sensations qu’ils éprouvent, ne sont pas maîtres de se retirer à temps : l’inquiétude, la crainte des suites, diminuent

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