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violet cardinal, contre la fenêtre, ils m’éblouissent, m’empêchent de voir la mer.

« J’en veux presque à ces fleurs trop belles, trop voluptueuses, de retenir ici mon attention humaine qui trouve tout de suite en elles, mille souvenirs de chair et d’ardeur.

« Leur odeur poivrée monte comme la nuit, quand les corps vont s’étreindre dans la chambre chaude.

« Il ne faut pas, non il ne faut pas trop regarder ces fleurs, mais plutôt la mer qui étend derrière leur bouquet, sa ligne profonde.

« Les voiliers glissent avec le jour.

« Ici,

« Je m’enlise comme un homme, dont les pieds et les mains sont pris dans la terre, et qui s’y enfonce à quatre pattes comme une bête lourde, au visage tourné vers l’Orient.

« Et là-bas,

« Je vogue, comme un homme qui a perdu son corps et le goût de la vie pour une chasse à l’espace, pour une faim éternelle. »


AUTRES NOTES DE DANIEL

« La vie, non point la vie, le carnaval. L’enfance vous apprend mal à vivre découvert, mais bientôt la terrible humiliation des gifles a réveillé en nous le sens du mensonge. Mourir n’est rien si près de la naissance. Il faut vivre, mais sous une armure.

Vingt années, on la forge dans les larmes et les adieux, jusqu’au jour où, couvert à son tour, on souffre sans inspirer de compassion. Alors, et c’est là que commence l’aventure, des êtres viennent et vous reprochent votre trop visible et