Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 6.djvu/234

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230 LIVRE V, CHAPITRE Il · cette terre de misère en proie aux pillards et aux bour- reaux oiïiciels ou volontaires. Et ce n’était pas seulement pour le citoyen, jaloux de ses droits, armé du sens poli- tique, qu’une telle décadence était un malheur public. Par l’insurrection du prolétariat, par le banditisme et la piraterie organisés comme plus tard, au temps des Ferdi- nands du royaume de 'Naples, le sentiment du mal allait se propageant dans toute l’Italie, jusque dans les vallées _ les plus reculées, jusque dans les plus humbles huttes : qui- conque se mouvait ou commerçait, quiconque achetait un boisseau de blé, subissait dans sa personne le contre- _ coup de la détresse générale. _ Faut-il se demander à qui reporter la cause de ce mal inouï, incurable ? Combien étaient nombreux ceux qu’on eut pu accuserl Possesseurs d’esclaves, ayant le cœur dans leur bourse; soldats sans discipline, généraux laches, ou incapables, ou téméraires, démagogues du Forum a la chasse de fausses idées, chacun d'eux avait part a la faute, ou plutôt qui donc n’en était point responsable? On se . disait instinctivement que ces malheurs, ces hontes et cet écroulement colossal ne pouvaient venir d`un seul. De meme que la grandeur de la République romaine n’avait point été faite par quelques hommes d’un génie supérieur, et qu’elle sortait d'une agrégation civique organisée puis- samment, de même la chute de l’édifice provenait, non — des actes d’un petit nombre d’individualités funestes, mais ` du vice de la désorganisation générale. La grande majorité du peuple était pervert_ie ; chacune des pierres étant pourrie, - contribuait pour sa part a la ruine de` l’ensemble : les ` fautes commises par la nation entière, la nation entière les . payait. ·On était injuste, quand `voyant dans le pouvoir l’expression dernière et concrete de la cité, on le procla- mait seul responsable de toutes les maladies, incurables ou non, du corps social : mais ce qu’il y avait de vrai, c’est que le pouvoir contribuait dans une proportion effrayante aux fautes de tousl Dans la guerre d'Asie-Mineure, par