Page:Monselet - Les Aveux d’un pamphlétaire, 1854.djvu/85

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eize ans. Elles se poursuivaient en riant ; l’une d’elles se baissait quelquefois pour cueillir des fleurs, qu’elle jetait ensuite, toutes mouillées de rosée, au visage de ses compagnes. Tantôt elles disparaissaient, mais pour reparaître un peu plus loin, aussi bruyantes, aussi gracieuses.

Je n’ai guère abusé, dans mes écrits, de ces images heureuses. Mon style a toujours été un style de corrompu. Ne vous moquez pas trop de moi si ma pastorale vous paraît gauche, et si, en voulant être sincère, je ne parviens qu’à être ridicule.

Cette apparition enchanta mes vingt ans. Je restai immobile et ému.

Pourquoi ne pouvais-je pas me détacher de cette grille ? Était-ce, dans mon rêve, un pressentiment des traverses qui devaient m’assaillir ? Soudain, une de ces enfants aux engageants regards m’aperçut et, du geste, m’engagea à venir. Je demeurai, hésitant. La halte me semblait bien douce, en effet, mais le chemin était là qui m’appelait, le chemin infini et brillant, plein de curiosités et d’aventures. La jeune fille s’approcha, et, lisant dans mes yeux :

— Restez, me dit-elle ; ici, c’est le bonheur !