broderie aux paillettes ternies, relevées de quelques petits grains de verroterie de couleur, son jabot d’une semaine, largement saupoudré de tabac d’Espagne, et son lorgnon en sautoir ? »
La langue de Mercier était un peu prompte à la censure, et elle faillit parfois lui jouer de mauvais tours, un, entre autres, que les Mémoires de Fleury racontent trop bien pour que nous soyons tenté de leur substituer une autre version :
« Mandé d’un style assez impératif chez M. le duc de Rovigo, il crut cette fois qu’il fallait se préparer à soutenir un rude assaut ; il s’arrangea ce jour-là de pied en cap : bel habit tabac d’Espagne, à larges boutons ; manchettes faisant la roue ; bien poudré, superbe queue, abajoues à l’oiseau-royal, et pour couvre-chef un chapeau à trois larges cornes dont la forme n’avait pas varié depuis 1781. Ce fut ainsi soigné qu’il se présenta au ministre de la police.
« — Ah ! vous voilà ! C’est donc vous, monsieur ?
« — Sébastien Mercier, le premier livrier de France.
« — Et grand causeur aussi. Vous dites de belles choses, monsieur !
« M. de Rovigo accompagna cette phrase d’un rapport circonstancié qu’il mit sous les yeux de l’ex-conventionnel.
« — Eh bien ! qu’en dites-vous ?
« — Que vous êtes parfaitement instruit ; on ne vous vole pas votre argent.
« — Ce rapport est un de vos moindres méfaits : vous vous donnez bien d’autres libertés à l’égard de l’empereur !