Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/182

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delà les sommets du Mont-Rose la plaine immense de la Lombardie ; déjà l’oubli, le repos, la fuite, tous les esprits des solitudes heureuses nous conviaient et nous invitaient ; déjà, quand, le soir, les mains jointes, nous nous regardions l’un l’autre en silence, nous sentions s’élever en nous ce sentiment plein d’une grandeur étrange qui s’empare du cœur à la veille des longs voyages, vertige secret et inexplicable qui tient à la fois des terreurs de l’exil et des espérances du pèlerinage. Ô Dieu ! c’est ta voix elle-même qui appelle alors, et qui avertit l’homme qu’il va venir à toi. N’y a-t-il pas dans la pensée humaine des ailes qui frémissent et des cordes sonores qui se tendent ? Que vous dirai-je ? n’y a-t-il pas un monde dans ces seuls mots : « Tout était prêt, nous allions partir » ?

Tout à coup Brigitte languit ; elle baisse la tête, elle garde le silence. Quand je lui demande