Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/212

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servi même en quelque sorte d’instrument à sa mauvaise destinée. N’était-il pas tout naturel qu’ils échangeassent quelques tristes regards, que la vue de ce jeune homme rappelât à Brigitte le passé, quelques souvenirs et quelques regrets ? Pouvait-il à son tour la voir partir sans crainte, sans songer malgré lui aux chances d’un long voyage, aux risques d’une vie désormais errante, presque proscrite et abandonnée ? Sans doute cela devait être, et je sentais, quand j’y pensais, que c’était à moi à me lever, à me mettre entre eux deux, à les rassurer, à les faire croire en moi, à dire à l’une que mon bras la soutiendrait tant qu’elle voudrait s’y appuyer, à l’autre que je lui étais reconnaissant de l’affection qu’il nous témoignait et des services qu’il allait nous rendre. Je le sentais, et ne pouvais le faire. Un froid mortel me serrait le cœur, et je restais sur mon fauteuil.