Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/320

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qu’Octave de T*** a tué sa maîtresse, et après-demain on n’en parlerait plus. Qui nous suivrait au dernier cortège ? Personne qui, en rentrant chez soi, ne déjeunât tranquillement ; et nous, étendus côte à côte dans les entrailles de cette fange d’un jour, le monde pourrait marcher sur nous sans que le bruit des pas nous éveille. N’est-il pas vrai, ma bien-aimée, n’est-il pas vrai que nous y serions bien ? C’est un lit moelleux que la terre ; aucune souffrance ne nous y atteindrait ; on ne jaserait pas dans les tombes voisines de notre union devant Dieu ; nos ossements s’embrasseraient en paix et sans orgueil ; la mort est conciliatrice, et ce qu’elle noue ne se délie pas. Pourquoi le néant t’effraierait-il, pauvre corps qui lui es promis ? Chaque heure qui sonne t’y entraîne, chaque pas que tu fais brise l’échelon où tu viens de t’appuyer ; tu ne te nourris que de morts ; l’air du ciel te pèse et t’écrase, la terre