Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/70

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la feuille sur laquelle le hasard m’avait fait tomber ?

Mon orgueil, d’ailleurs, ne voulait pas que je prisse le livre ; était-ce donc vraiment mon orgueil ? « Ô Dieu ! me dis-je avec une tristesse affreuse, est-ce que le passé est un spectre ? est-ce qu’il sort de son tombeau ? Ah ! misérable, est-ce que je vais ne pas pouvoir aimer ? »

Toutes mes idées de mépris pour les femmes, toutes ces phrases de fatuité moqueuse que j’avais répétées comme une leçon et comme un rôle pendant le temps de mes désordres, me traversèrent l’esprit subitement ; et, chose étrange ! tandis qu’autrefois je n’y croyais pas en en faisant parade, il me semblait maintenant qu’elles étaient réelles, ou que du moins elles l’avaient été.

Je connaissais madame Pierson depuis quatre mois, mais je ne savais rien de sa vie passée et ne lui en avais rien demandé. Je