Page:Nerval - Aurélia, Lachenal & Ritter, 1985.djvu/170

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je ne veux pas les perdre dans une froide lettre… Quoi de plus triste qu’une lettre ? quoi de plus facile pour une pensée indifférente et de plus malaisé pour un cœur épris ? La pensée se glace en se traduisant en phrases, et les plus douces émotions de l’amour ressemblent alors à ces plantes desséchées, que l’on presse entre des feuillets, afin de les conserver… Mais songer que tout cela peut être lu dans un instant de contrariété, d’ennui, d’humeur légère ! ou songer que ce peut être par là qu’on vous juge et que l’on peut jouer sur un morceau de papier son avenir et son bonheur, sa vie et sa mort ! Non ! non ! je ne vous écris pas sérieusement aujourd’hui, et je garde les belles fleurs de mon amour, qui ne veulent plus s’épanouir que près de vous et sous vos yeux !