Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/367

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punch offert à ces dames !… L’Espagnole était presque aussi séduisante que la Vénitienne ; mais elle avait de faux mollets, — et sa cachucha paraissait due aux leçons de Mabille.

« Travaillons, frères, travaillons ; — la boîte osseuse se nettoie. — Le compartiment de la mémoire embrasse déjà une certaine série de faits. — La causalité, — oui, la causalité, — le ramènera au sentiment de la subjectivité. — Prenons garde seulement qu’il ne s’éveille avant que notre tâche soit finie.

« Le malheureux se réveillerait pour mourir d’un coup de sang, que la Faculté qualifierait d’épanchement au cerveau, — et c’est nous qu’on accuserait là-haut. — Dieux immortels ! il fait un mouvement ; il respire avec peine. — Raffermissons la boîte osseuse avec un dernier coup de foulon, — oui, de foulon. — Le coq chante, — l’heure sonne… Il en est quitte pour un mal de tête… Il le fallait ! »


XIX

JE M’ÉVEILLE

Décidément, ce rêve est trop extravagant… même pour moi ! Il vaut mieux se réveiller tout-à-fait. — Ces petits drôles ! qui me démontaient la tête, et qui se permettaient après de rajuster les morceaux du crâne avec de grands coups de leurs marteaux ! — Tiens, un coq qui chante… ! Je suis donc à la campagne ? C’est peut-être le coq de Lucien : ἀλεκτρυών. — Oh ! souvenirs classiques, que vous êtes loin de moi !

Cinq heures sonnent, — où suis-je ? — Ce n’est pas là ma chambre… Ah ! Je m’en souviens, — je me suis endormi hier à la Sirène, tenue par le Vallois, — dans la bonne ville de Meaux (Meaux-en-Brie, Seine-et-Marne).

Et j’ai négligé d’aller présenter mes hommages à monsieur