Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/76

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Une occasion se présenterait dans tous les cas d’anéantir bien des fausses suppositions. Il y a quelqu’un, madame, dont l’assiduité vous a fait du tort dans l’opinion, et qui s’est plu même à vous compromettre, si l’on dit vrai. Ce n’est pas là pour moi une rivalité. Je ne me préoccupe pas le moins du monde de ce détail, et ne voudrais rien faire de trop important pour trop peu. Je vous le dis, vous ne savez même peut-être pas ce que c’est, un homme sans valeur et sans mérite, quelque chose d’insignifiant et de frivole, qu’il suffirait peut-être d’effrayer ou de punir, s’il vous a offensée en effet. Nous en dirons deux mots, si vous voulez, et nous laisserons au besoin la chose pour ce qu’elle vaut. Mais, de grâce, un peu de confiance, un peu de clarté dans ces détours où je me heurte à chaque pas.


LETTRE XI

Mon Dieu ! mon Dieu ! j’ai pu vous voir un instant. Quoi ! vous n’êtes donc pas si irritée que je le croyais ? quoi ! vous avez encore un sourire pour ma personne, un doux rayon de soleil pour mes tristesses ! J’emporte ce bonheur, de peur d’être détrompé par un mot que je fuis toujours, moi qui me croyais déjà puissant. Un regard m’abat, un mot me relève, je ne me sens fort que loin de vos yeux.

Oui, j’ai mérité d’être humilié par vous ; oui, je dois payer encore de beaucoup de souffrances l’instant d’orgueil auquel j’ai cédé. Ah ! c’était une risible ambition que celle-là. Me croire chéri d’une femme de votre talent, de votre beauté.

Je dois borner mes prétentions à vous servir. J’accepte vos dédains comme une justice. Ne craignez rien, j’attends, ne craignez rien.


LETTRE XII

Deux jours sans vous voir, sans te voir, cruelle ! Oh ! si tu m’aimes, nous sommes encore bien malheureux. Toi, tes leçons, ton théâtre, tes occupations ; moi-même, un théâtre, un