Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/147

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tes, nous préférons ne pas croire à la " faute ". Nous pensons que toutes les actions, de quelque espèce qu’elles soient, sont de valeur identique dans leur racine ; de même, les actes qui se tournent contre nous peuvent être, par cela même, utiles au point de vue économique, et désirables pour le bien public. Dans certains cas particuliers, nous nous avouerons à nous-mêmes qu’une action aurait facilement pu nous être épargnée, — les circonstances seules nous ont prédisposés pour elle. Qui, d’entre nous, favorisé par les circonstances, n’aurait pas déjà parcouru toute l’échelle des crimes ?… C’est pourquoi il ne faut jamais dire : " Je n’aurais pas dû faire telle chose " -, mais toujours seulement : " Comme c’est étrange que je n’aie pas fait cela cent fois déjà ! " - En fin de compte, il y a très peu d’actes qui soient typiques et qui présentent un véritable raccourci de l’individu ; et à considérer combien peu la plupart des gens sont des individualités, on s’apercevra combien rarement un homme est caractérisé par un acte particulier. Nous voyons des actions dictées par les circonstances, qui restent à fleur de peau, mouvements réflexes qui résultent de la décharge d’une irritation : elles se produisent bien avant que la profondeur de notre être n’en soit touchée, avant qu’on l’ait interrogée à ce sujet. Une colère, un geste, un coup de couteau : qu’y a-t-il là d’individuel ? L’acte apporte souvent avec lui une espèce de torpeur et de contrainte,