Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/174

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i ont quelque importance. On a dû le payer, cher, car ils ont mis en décri les qualités plus précieuses de la vertu et de l’homme, ils ont excité l’un contre l’autre la mauvaise conscience et le sentiment de dignité de l’âme noble, ils ont égaré les penchants de bravoure, de générosité, d’intrépidité, les penchants excessifs des âmes fortes, jusqu’à la destruction de soi-même…

117.

Ces petites vertus de bêtes de troupeau ne mènent nullement à la " vie éternelle " : c’est peut-être très habile de les mettre en scène en même temps que soi-même, mais, pour celui qui a gardé l’œil ouvert, cela n’en reste pas moins le plus ridicule de tous les spectacles. On ne mérite nullement un privilège sur terre et dans le ciel, lorsque l’on a mené sa chère petite douceur de mouton jusqu’à la perfection ; on n’en continue pas moins à être, au meilleur cas, un cher petit mouton absurde, avec des cornes, et rien de plus - en admettant que l’on ne crève pas de vanité et que l’on ne provoque pas de scandale par ses attitudes de juge. Quelle monstrueuse transfiguration de couleurs illumine ici les petites vertus - comme si elles étaient le reflet de qualités divines ! L’intention naturelle, l’utilité de toutes les vertus est systématiquement passée sous silence ; elle ne vaut que par rapport à un commandement d