Page:Nietzsche - La Volonté de puissance, t. 1, 1903.djvu/231

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tinct de connaissance à un instinct d’assimilation et d’asservissement. C’est pour obéir à cet instinct que les sens, la mémoire, les impulsions se sont développés. La réduction des phénomènes aussi rapide que possible, l’économie, l’accumulation du trésor acquis sur le domaine de la connaissance (c’est-à-dire du monde approprié et rendu maniable)… La morale est une science si singulière parce qu’elle est pratique au plus haut degré : en sorte que le point de vue de la connaissance pure, la probité scientifique sont abandonnés aussitôt, dès que la morale exige ses réponses. La morale dit : j’ai besoin de certaines réponses, — que les raisons, les arguments, les scrupules viennent après coup, ou qu’ils ne viennent pas. - " Comment doit-on agir ? " - Si l’on songe que l’on a affaire à un type développé souverainement, dont il s’est " agi " depuis des milliers d’années, chez qui tout est devenu instinct, opportunité, automatisme, fatalité, l’urgence d’une pareille question de morale vous paraîtra même tout à fait comique. " Comment doit-on agir ? " - La morale a toujours reposé sur un malentendu : de fait, une espèce qu’une fatalité intime poussait à agir de telle façon voulait se justifier en imposant sa norme comme norme universelle. " Comment doit-on agir ? " - ce n’est pas là une