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PAR DELÀ LE BIEN ET LE MAL

reconnu le fond de sa nature : c’est un instrument, une sorte d’esclave, à la vérité un esclave sublime en son genre, par lui-même il n’est rien — presque rien. L’homme objectif est un instrument, un instrument précieux pour mesurer, qui se dérange et se brise facilement, un miroir admirable qu’on doit garder avec soin et honorer, mais il n’est pas un but ; il n’est ni une fin ni un commencement ; il n’est pas un homme complémentaire en qui le reste de l’existence se justifie, il n’est pas une conclusion — et moins encore un début, une création, une cause première ; rien n’existe en lui qui soit âpre, puissant, basé sur lui-même, rien qui veuille être maître. C’est plutôt un vase délicatement ouvré, aux contours subtils et mouvants qui doit attendre la venue d’un contenu quelconque pour se former d’après ce contenu. C’est d’ordinaire un homme sans teneur, un homme « sans essence propre ». Conséquemment une non-valeur pour la femme. Ceci entre parenthèses. —

208.

Lorsqu’un philosophe affirme aujourd’hui qu’il n’est pas un sceptique — j’espère qu’on a tiré cette conclusion de la description de l’esprit objectif, donnée ci-dessus — tout le monde entend cela avec déplaisir ; on l’examine avec une certaine appréhension, on voudrait l’interroger au sujet de tant de choses… En outre, parmi les auditeurs craintifs