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LES AMOURS

Donc j’ai pu tolérer, moi, citoyen de Rome,
De tes verrous l’hostile accueil !
Donc j’ai pu, quand tes bras pressaient tel ou tel homme,
Veiller, en esclave, à ton seuil !
Je le vis, cet amant, sortir, languide et blême,
Comme un vétéran épuisé.
Mais le comble du mal, c’est qu’il me vit moi-même :
Le Parthe ainsi soit méprisé I…

Quand n’escortai-je pas tes moindres promenades.
En gardien, en frère, en époux ?
Sur ton front ma présence attirait mille œillades ;
Plus d’un amour naquit par nous.
À quoi bon rappeler tes mensonges indignes,
Ton oubli cruel des serments,
Ces mots tracés à table, et les funestes signes
Échangés avec tes amants ?
On la disait malade, et j’accours, dans mon zèle ;
Pour mon rival elle était bien.
J’endurai cet affront, maint autre que je cèle.
Cherche un dos souple égal au mien.
Moi, couronnant ma nef de guirlandes votives,
J’entends, du port, l’onde et le vent.
Laisse là tes douceurs, autrefois suasives ;
Je ne suis plus le fou d’avant.

Mais la haine et l’amour se disputent mon être ;
L’amour vaincra, sans contredit.