Page:Péguy - De la situation faite au parti intellectuel dans le monde moderne, 1906.djvu/24

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sectateurs d’une secte, fût-elle une secte laïque, de prendre connaissance du mépris autorisé, du mépris paternel et inaugural, du mépris originel, du mépris gouvernemental, du mépris originaire, initial, du mépris enfin où son inventeur l’a tenue. Nos modernes, qui ne sont naturellement point clairvoyants, ont tout fait ici, tout ce qu’ils ont pu, pour aveugler encore ici leur inclairvoyance naturelle.

Nos modernes ne pouvaient naturellement point ignorer ces œuvres de Renan, compromettantes, et dans tous ses autres ouvrages ces passages compromettants. Mais comme les modernes expliquent tout, ils n’ont point manqué d’expliquer des œuvres et des passages qui n’entraient pas précisément dans leur politique, n’étant pas uniquement des œuvres et des passages de défense républicaine. Et comme les modernes sont naturellement très malins, ils n’eurent point de peine à trouver ces explications, qui sont naturellement des explications définitives. Et comme les explications que nous donnons du monde nous ressemblent toujours, nos modernes ont donné de ces œuvres et de ces passages des explications modernes. C’est-à-dire grossières, primaires, notoirement, grossièrement insuffisantes. Ils ont dit…

Tantôt ils ont dit que c’était par habitude ; et cette explication par l’habitude serait parfaitement recevable, au moins pour une partie, et pour une bonne partie, si ce mot même d’habitude ils ne l’avaient entendu en un grossier sens moderne, au sens d’une habitude scolaire, d’un pli intellectuel, d’une sorte de manie, profession-