Page:Péguy - De la situation faite au parti intellectuel dans le monde moderne, 1906.djvu/53

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fonde comme étant une communauté de vice, nous venons justement d’avoir une illustration la plus éclatante. Il avait été mille fois entendu, promis, juré, mis sur les programmes, ce qui n’est rien, mis sur les affiches, dans les journaux, dans les brochures, dans les revues, dans les livres, dans les déclarations et dans les pactes, les plus solennels, qu’aussitôt que le parti intellectuel serait parvenu au gouvernement de la République, à la domination de l’État, son premier soin serait d’assurer la neutralité, philosophique, religieuse, métaphysique, du gouvernement et de la domination de l’État de cette République. Il ne devait plus y avoir ni philosophie d’État, ni religion d’État, ni métaphysique d’État. De même qu’après le triomphe du dreyfusisme il ne devait plus y avoir de raison d’État.

Il faut à ce titre considérer comme un des plus grands événements du temps présent non point le discours de M. Viviani, le nouveau ministre du travail, récemment affiché sur nos murs, mais tout un passage de ce discours.

Un peu déshabitué de la tribune après, je crois, huit années d’absence, demeuré juvénile, très allant, et ami de la période oratoire et de la littérature éloquente parlementaire, au besoin fleurie, le nouveau ministre du nouveau ministère a fait ce que n’eussent point fait beaucoup de ses nouveaux collègues, beaucoup de ses amis, politiques ou amicaux, ce que n’eût point fait un homme infiniment plus avisé comme son collègue de l’Instruction publique et des cultes, un homme infiniment plus délié comme son collègue de l’Intérieur et président du conseil.

Ce que ni Briand ni Clemenceau n’eussent fait jamais,