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Il suffisait d’une dénonciation, pour que les passants fissent chorus… Un officier trouva, comme M. Sicre, que tout le monde avait reconnu Billioray… Et ce malheureux périt. Il avait sur lui des pièces établissant son nom véritable.

Notez bien ce détail : il ne ressemblait pas à Billioray. La plupart des innocents fusillés comme membres de la Commune ne ressemblaient même pas à celui sous le nom duquel ils mouraient.

Il n’est guère de personnage marquant de l’époque qui n’ait été fusillé une demi-douzaine de fois, pour le moins, dans les journaux de l’époque. Mais combien de ces exécutions n’ont jamais existé que dans les journaux ? Le plus souvent, les noms des victimes sont dans des listes de fusillés, sans détails. Un reporter pouvait grossir sa liste avec une certaine fantaisie.

On a été jusqu’à prétendre qu’il n’y avait rien de réel dans ces fusillades multiples ; et que les amis des vaincus, les vaincus eux-mêmes, les faisaient insérer dans les journaux pour dépister plus commodément les recherches. — C’est purement absurde. On a vu que l’exécution des faux Billioray n’était pas douteuse ; je citerai tout à l’heure celles des faux Vallès ; j’en puis citer une autre encore. Quand M. Ulysse Parent, le conseiller municipal de Paris, fut arrêté pour la première fois, on le conduisit près de la mairie de la Banque et on lui désigna un cadavre dans un tas de fusillés, en lui disant que c’était « son ami Lefrançais ». Le faux Lefrançais, cette fois, ressemblait au vrai à un tel point que M. Parent s’y trompa lui-même. Et pourtant M. Lefrançais n’a pas été fusillé.

D’ailleurs, toutes les fois que la mention de l’exécution est accompagnée de détails assez précis ou qu’elle se retrouve dans beaucoup de journaux à la fois, il faut bien qu’elle corresponde à un fait réel.