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XLII

LES VOYAGEURS POUR SATORY

Dans la semaine de Mai, sauf de rares exceptions, on ne relâchait personne : ce qu’on ne fusillait pas, on l’envoyait aux prisons de Versailles. L’effroyable chiffre officiel de plus de quarante mille prisonniers dit assez de quoi étaient composés les convois, où le rédacteur du Soir ne voyait que des brigands et des femelles. Ce n’étaient plus des fédérés, c’étaient des Parisiens, des Parisiennes qu’on arrêtait au hasard.

Le lecteur a déjà, par nos articles précédents, quelques idées de ce qu’on trouvait dans ces convois. Un médecin arrêté à son ambulance, le docteur L*** (voir le chapitre sur le parc Monceau) y avait pour voisin un de ses confrères arrêté comme il allait faire ses visites ; un vieux professeur arrêté chez lui, comme il se faisait la barbe, pour avoir répondu, aux soldats en perquisition, qu’il n’y avait pas de jeunes gens dans la maison ; un cocher d’omnibus pris le fouet à la main, etc., etc. On pouvait rencontrer aussi, dans ces tristes cortèges, quelques-uns des pompiers de province, accourus à l’appel du gouvernement pour éteindre les incendies de Paris, et devenus victimes des fables absurdes répandues sur leur corps. (Voir le chapitre relatif aux pompiers.) Parfois, c’étaient tous les habitants d’un quartier ou d’une rue, arrêtés par précaution stratégique. (Petit Moniteur, du 26.) « C’est une mesure de prudence qui a nécessité des arrestations en masse où ont été compris tous les habitants de quartiers