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ET DE MORALE CONTEMPORAINES

populaires de province qui, par crainte de la politique, interdisent leur salle de lecture à tous les journaux généralement quelconques. Il ne manque plus que de proscrire l’histoire contemporaine, l’économie sociale, et quoi encore ? On enseignerait les dynasties égyptiennes ; que « Thetmosis était valétudinaire, et qu’il tenait cette complexion de son aïeul Alipharmutosis[1]. » Une certaine bourgeoisie ne demanderait pas mieux. Elle a ses raisons de préconiser cette neutralité politique. Mais la classe ouvrière a aussi les siennes de se défier. Réagissant, dans maintes Universités populaires, contre des intellectuels par trop bénins, elle en assume la direction pour la conformer à ses vues. Et elle fait très bien.

Il ne faut certes pas que l’Université populaire devienne une sorte de club. Mais faut-il que, sous prétexte de travailler à la paix sociale, elle néglige son véritable objet ? La paix ne doit point se faire par une lâche incuriosité de toutes les questions actuelles. Elle se fera par l’accord, sur ces questions, de ceux qui veulent travailler à l’émancipation du peuple ; elle se fera par leur lutte commune contre les ennemis de la justice. Mais quel est l’objet véritable de l’Université populaire ? C’est de préparer le peuple à cette lutte décisive ; c’est de lui assurer la victoire en fortifiant son intelligence et en affermissant sa volonté.

  1. La Bruyère.